03/07/2009

Karl Malden (1912-2009) Un homme qui avait du nez


Il est difficile d'évoquer Karl Malden sans penser immédiatement à son nez, appendice exagérément proéminent et épaté. Cet organe, fixé sur un visage par ailleurs plutôt commun, constituait son principal trait physique et il ne paraît pas exagéré de reconnaître que sans cette excroissance naturelle la carrière de Malden aurait été tout autre. Cette présence intrigante qui tranchait singulièrement avec la banalité de sa physionomie trouvait comme un écho dans sa personnalité de bon garçon qu'on sentait néanmoins secouée par des sentiments troubles et complexes.
Ses meilleurs rôles mettent d'ailleurs la singularité de son caractère en avant, comme son personnage de Mitch, le soupirant timide de Blanche dans "Un tramway nommé Désir" (A Streetcar Named Desire, 1951), rôle pour lequel il obtint justement un oscar. Ses prestations de policier ambigu dans "Mark Dixon détective" (Where The Sidewalk Ends, 1950), de Preminger et dans "La Loi du silence" (I Confess, 1953), d'Hitchcock, sont également marquées par une composition toute en subtilité.
Elève d'Elia Kazan au sein du Group Theatre, c'est le même Kazan qui lui offre ses premiers rôles importants dans "Un Tramway" et "Sur les quais" (On The Waterfront, 1954) et surtout "Baby Doll" (1956), sans doute sa plus belle performance. Abonné aux seconds rôles (il est souvent dans l'ombre de Brando, protégé de Kazan, dans "Un Tramway", "Sur les quais" et "La Vengeance aux deux visages" (One-Eyed Jacks, 1961), le curieux western mis en scène par Brando lui-même), il donne la réplique aux plus grands : Burt Lancaster, Gary Cooper, Steve McQueen, Montgomery Clift - sans jamais être réduit au rôle de faire-valoir. Il faut dire qu'il savait camper ses personnages, bons ou mauvais, avec une nuance et une humanité telles qu'ils étaient souvent au moins aussi intéressants que les personnages principaux.
A noter qu'il fit l'expérience de la mise en scène, remplaçant Delmer Daves victime d'un arrêt cardiaque, le temps de tourner les dernières séquences de "La Colline des potences" (The Hanging Tree, 1959), troublant western que Bertrand Tavernier compte parmi les dix plus beaux jamais tournés.

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