03/02/2010

In the air - beaucoup de vent pour rien


La palme du film le plus hypocrite de ce début d'année revient sans conteste à "Up In The Air" ("In The Air" dans sa version française - allez savoir pourquoi) de Jason Reitman, responsable déjà de "Thank You For Smoking" et "Juno", deux films sympathiques abordant néanmoins avec une certaine complaisance des sujets à dimension sociale, voire sociétale. "Up In The Air" se situe dans la même veine mais surfe cette fois avec opportunisme sur le thème en vogue de la crise américaine. D'où vient le sentiment de malaise, cette impression que Reitman prend ses spectateurs pour des idiots ? Par le fait que le film débute comme une satire des méthodes de licenciement en vogue aux Etats-Unis pour finalement s'achever sur la conclusion que l'amour et la famille incarnent des valeurs plus importantes que le travail ? Par le fait que Reitman, comme gage d'authenticité sans doute, laisse à de vraies personnes licenciées le soin d'énoncer ce message plein de sagesse ? Par le fait que la morale du film se résume peu ou prou à "mieux vaut être pauvre et entouré de sa famille que riche et seul" ?
Ne pas chercher ici, on l'aura compris, une satire féroce ou même une réflexion subtile sur le monde de l'entreprise, Jason Reitman n'est pas un décrypteur de la société américaine ni même un moraliste, il n'a rien à voir avec Michael Moore ou Robert Altman, figures écrasantes pour lui. En fait c'est un faux dur, un faux cynique, ce que l'on pressentait déjà dans "Thank You For Smoking" encore que le personnage incarné par Aaron Eckhart avait le mérite d'aller jusqu'au bout de ses principes, aussi contestables qu'ils puissent être. Ici le personnage interprété par George Clooney (qui croit toujours personnaliser le chaînon manquant entre Cary Grant et Clark Gable) n'assume même pas ce qu'il est : il se met tout à coup à croire au mariage ! - revirement qui nuit complètement à la portée intiale du film. En fait, Jason Reitman est un doux, il croit à l'humanité, au bonheur, à la famille : la scène de mariage est d'ailleurs celle qu'il filme le mieux. Ce côté fleur bleu contamine tous les personnages : Clooney donc, mais aussi la trop rare Vera Farmiga qui incarne une working girl apparemment sans état d'âme, sacrifiant foyer et mari sur l'autel du "business" mais se révélant in extremis être une femme mariée (quoique infidèle) et bardée d'enfants, et Anna Kendrick qui endosse le rôle d'une jeune femme aux dents longues qui prend subitement conscience de l'inhumanité de son job. Bref, Reitman accumule les clichés avec brio, ce qui aboutit à un film curieusement bancal : trop sentimental pour que la satire soit réussie et trop stéréotypé pour que sa générosité fonctionne vraiment.
Il reste néanmoins un réalisateur attachant malgré ce ratage que nous mettrons finalement sur le compte de la maladresse, même si un humour douteux (le "Can-sir", calembour à oublier d'urgence), et un excès de naïveté - ce qui ne constitue certes pas un défaut en soi, "Mr. Smith au Sénat" et "La Vie est belle", probables modèles de ce film, sont des sommets de naïveté, mais n'est pas Capra qui veut - jouent contre lui. Nous attendrons cependant son prochain film avec une certaine indulgence.

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